Michel* témoigne de son parcours d'engagé
L'équipe du Secours Catholique de Bourg-en-Bress a accompagné Michel*, Congolais dans son parcours de demandeur d'asile. Participant actif dans l'équipe du jardin partagé, il s'est engagé comme bénévole, a repris confiance et aujourd'hui, ses papiers en règle, bénéficie d'une intégration réussie. Il témoigne.
Je m’appelle Michel* et j’ai 43 ans. Militant pour un État juste et démocratique dans mon pays la République démocratique du Congo (RDC), j’ai participé à des manifestations de luttes populaires. J’ai été repéré et poursuivi par les autorités. J’ai été détenu et libéré à plusieurs reprises. Mais avec le temps, je suis devenu une des cibles à éliminer par des miliciens du pouvoir parce que je récidivais. Par chance, certaines personnes parmi eux m’ont averti de ce qui se tramait contre moi. Je me suis d’abord réfugié dans un pays voisin. Mais les menaces sur ma vie devenant de plus en plus pesantes, j’ai eu la chance de tomber sur une bonne âme qui m’a aidé à fuir pour la France en attendant que les choses se décantent au pays.
Je suis arrivé en France en 2016 avec un visa de 3 mois. Toujours menacé dans mon pays, ne pouvant pas repartir, j’ai déposé une demande d’asile qui m’a été refusé. J'ai bascule rapidement vers le statut de sans papiers. Ca a été le début d’une autre vie de galère.
* Par souci de confidentialité, le prénom a été modifié.
J’ai quitté la région parisienne pour rejoindre des proches à Bourg-en-Bresse. En situation irrégulière et avec la peur au ventre d’être arrêté et reconduit dans mon pays où je risque ma vie, je sortais très rarement. Un jour, je suis passé devant la délégation du Secours Catholique que je ne connaissais pas. J'ai vu un groupe de personnes dans la cour. En me rapprochant pour me renseigner, un salarié m’a accueilli, a répondu à mes questions et m’a proposé de revenir si je le souhaitais. Ce que je fis le lendemain car je m’étais bien senti et j'avaisi apprécié l’attention durant le temps de l’accueil. L’animateur m’a présenté l'association et les activités qu'elle mène à Bourg-en-Bresse.
Ce que je voulais premièrement, c’était de rencontrer des personnes, ne plus continuer de rester seul chez moi toute la journée lorsque ma femme partait travailler (il s’est marié entre temps en France). J’ai donc accepté de participer au jardin partagé qui semblait me convenir le mieux. En novembre 2019, j’ai commencé à venir régulièrement au Secours Catholique. L’animateur a de nouveau pris un temps avec moi. Je lui ai dit mes bonnes impressions et mon envie de continuer à faire des choses avec l'équipe puisque sans activité et en bonne santé, j'avais du temps à donner pour me sentir utile. J’ai donc accepté de devenir bénévole à la délégation de l’Ain et j'ai rempli la fiche de bénévole.
Environ 5 mois après mon engagement bénévole, toute la France a été confinée. À ma grande surprise, l'association a maintenu le lien avec moi pour avoir de mes nouvelles de temps en temps. Plus marquant, j’ai reçu la visite de Dominique, bénévole qui m’a apporté des chèques de services à trois reprises. Avec ma famille, nous nous sommes sentis appartenir à une famille, celle du Secours Catholique. Cette attention nous a touchés et bien aidés en cette période difficile que nous traversions.
À la reprise des activités après le confinement, le jardin partagé a changé lieu : de Bourg-en-Bresse, il a été installé à Péronnas dans un nouveau site. Il a fallu monter un abri de jardin, préparer la terre, faire des achats de semences. J’étais régulier et participais à toutes les activités. L’un des référents de l’équipe, Maurice, m’a dit un jour qu’il appréciait « le sérieux » que je mettais dans mon engagement. Il m’a associé à l’organisation des activités de l’équipe du jardin ; il m’a même confié quelques fois l’achat de semences. Je l’ai vécu comme une marque de confiance : cela m’a fait du bien et a donné du sens à ce que je faisais dans ma mission de bénévole. Tous ces moments vécus avec le Secours Catholique m'ont donné l’impression de vivre normalement. Mais quand je rentrais chez moi, je me revoyais diminué par mon statut de sans papiers…
L’animateur m’y a encouragé et proposé l’accompagnement du Secours Catholique dans ma démarche. Il en a parlé à sa responsable, Bénédicte, qui m’a aussi assuré de la disponibilité des bénévoles pour m’accompagner dans mon parcours administratif. J’avais beaucoup de doutes quant à l’issue favorable mais je me suis dit que je n’avais pas grand-chose à perdre en essayant. À mon grand bonheur, avec l’implication du Secours Catholique, la préfecture m’a d’abord donné un récépissé d’autorisation de séjour sans droit de travailler. Puis, avec l’aide, les conseils et l’accompagnement des bénévoles, j’ai fait et déposé mon CV dans des agences d’intérim. En janvier 2022, la préfecture m’a remis ma carte de séjour d’un an cette fois-ci avec l’autorisation travailler. Quelle fut ma joie ! Le même jour, j’ai envoyé la photocopie de mon titre de séjour dans les agences où j’avais déposé mon CV et trois jours après, j’ai signé un contrat d’embauche en contrat à durée déterminé. Franchement, je me suis dit qu'enfin une nouvelle vie commençait pour moi.
La petite histoire, c’est que mon épouse est actuellement en congé de maternité. Les poste des dépenses ont augmenté et les revenus de ma femme ont baissé. Nous n’avons pas les moyens de mobiliser le montant du timbre fiscal à payer à la préfecture pour retirer ma carte de séjour. Encore une fois, le Secours Catholique a répondu présent. J’ai bénéficié de son aide financière que je rembourserai en 12 mois.
Je peux dire sans honte que grâce à l’appui de Secours Catholique, mon statut et ma vie ont changé en France. Je peux aller et revenir sans crainte, travailler et gagner ma vie sans risque d’enfreindre la loi. Quand j’étais en région parisienne, j’ai eu un souci avec la police pour avoir travaillé au noir. La police m’a fait un rappel à la loi avec sursis.
Aujourd’hui, je suis heureux de voir ma situation évoluer positivement grâce à ma rencontre avec le Secours Catholique à Bourg. J’ai rencontré des personnes à l’écoute. J’ai dit à Maurice que je continuerai à venir au jardin quand je le peux. Maurice a apprécié, mais m’a conseillé de consacrer mes temps libres à ma famille avant tout et de penser au jardin en dernier. J’ai entendu ça mais les bénévoles que j’ai rencontrés au jardin, avec qui j’ai partagé de bons moments forts, je les considère aussi comme des personnes proches donc la famille aussi. On verra avec le temps. Tout n’est pas terminé. C’est maintenant que la marche commence pour moi, mais je garderai un lien avec le Secours Catholique en revoyant les personnes qui m’ont accompagné. Je ne sais pas si j’ai pu apporter autant au Secours Catholique que j’ai reçu.